Une initiative qui pour but de ramener un monument de Heinrich Heine du jardin botanique de la ville française de Toulon, où il se situe actuellement, vers la ville de Hambourg où il se trouvait de 1909 à 1936 (pendant 27 ans !!!). Quelle histoire se cache là-dessous ? Je pense que ce
reportage décrit l’odyssée la plus extraordinaire qui soit jamais arrivée à un monument : En 1873, le sculpteur danois Louis Hasselrjis crée une première ébauche pour un monument Heine.
Et c’est Sissi, Elisabeth, Reine d’Autriche qui, en 1891, ordonna la réalisation en marbre (1,60 cm de haut, 2250 kg). Elle était une grande admiratrice de Heinrich Heine et s’est faite beaucoup d’ennemis dans les cercles de la noblesse grâce à son engagement pour Heinrich Heine. Par conséquent, elle hésita D’abord avant de procurer un emplacement à la statue dans sa propriété sur l’île de Corfou.
Sa proposition de l’offrir à la ville de Hambourg en tant que ville où Heine a tant séjourné fut cependant refusée par le sénat. Alors finalement Sissi fit ériger sur sa propriété : « Achilleion », un monoptère pour son monument, et le fit en 1892 transporter par eau jusque là-bas (premier voyage en bateau du monument !). Le 10 septembre 1898, Sissi fut assassinée à Genève sur la promenade de l’hôtel « Beau Rivage ». En 1907 l’empereur allemand Guillaume II acquit la propriété d’Elisabeth auprès de la maison royale autrichienne. Connu comme quelqu’un détestant furieusement Heinrich Heine (citation de Guillaume II : „Le pire saligaud de tous les poètes allemands“), rien ne fut plus urgent pour lui que de retirer le monument Heine. Par le biais du département du maréchal de la Cour, l’éditeur Campe reprend le monument à Hambourg, si ce fut par l’achat et à quel prix, cela resta très vague. (2ème voyage en bateau du monument !) Heinrich Julius Campe (1848-1909) est le fils de Julius Campe (1792-1867), le grand protecteur de Heinrich Heine qui achemina toutes les oeuvres de ce dernier. Il procure enfin un emplacement au monument à Hambourg, en outre typique de Hambourg, dans un immeuble debureaux. La «Barkhof GmbH» convint avec Monsieur Campe que le monument serait placé dans la cour d’honneur des espaces verts de son nouvel immeuble de bureaux.
Tout tend à dire que Julius Campe céda le monument Heine à son maître de maison, Franz Bach, après sa mort le 3 novembre 1909. Sa femme, Angèle, une native française, était retournée avec ses deux filles Gabriele et Olivia dans sa ville de naissance, Paris, déjà en 1880 lors du divorce. Après la fin de la première guerre mondiale, l’atmosphère antisémite s’accentua et le monument fut griffonné à plusieurs reprises dans la Barkhof. En mai 1926, le monument fut transféré de Hambourg à Altona et placé dans le « Donner’s Park » sur la route de l’Elbe, plus précisément dans le pavillond’un musée.
Protégé en ces murs, le monument y resta jusqu’en 1933 lorsque les nazis ordonnèrent la fermeture du musée. En 1934, la statue devait être retiréemais il n’y eut aucun acheteur, ainsi se présenta la fille de Julius Campe, Olivia Bouchard, née Campe. Elle prit l’éclatement de la guerre de 1939 comme raison pour faire transporter par eau la statue vers Toulon. Heinrich Heine fut exilé vers la France et ainsi son monument le fut aussi. C’est sur le bateau «Provida» (3ème voyage en bateau du monument !) que le monument voyage vers Marseille, ensuite par camion vers Toulon. Les informations concernant le lieu de séjour de la statue à Toulon sont très variées. Ce qui est sûr, c’est que la statue fut mise en caisse en 1942 et portée disparue afin de la protéger des troupes d’occupation allemandes.
En 1947, Madame Bouchard réussit à retrouver le « Heine de marbre » sous les décombres de la guerre, elle avait subit quelques dommages. En 1951, Olivia Bouchard, née Campe, connut la mort et céda le monument Heine à la ville Toulon. Et même le mari d’Olivia, Edmond Bouchard, n’a pas vécu assez longtemps pour voir la mise en place du monument. Il mourut en mars 1956. En novembre de la même année, une initiative internationale eut pour effet la mise en place du monument (dans la 100ème année de la mort de Heine). Même le ministre de la culture de la ville Hambourg de cette époque, Monsieur Biermann-Ratjen, est apparu et eut un discours émouvant sur l’entente des peuples.
Depuis ce jour, le Heine de marbre se trouve dans le quartier toulonnais Mourillon, dans le jardin botanique, de temps à autre couvert de mousse. Même moi j’ai dû couper quelques rameaux lorsque je suis venu avec les caméras de NDR le 2 juillet 2002 pour tourner un documentaire sur place, documentaire qui nous a également conduits à une entrevue avec l’adjoint au maire de Toulon. Jusqu’à présent, je vous ai raconté de la manière la plus brève possible ce que j’ai pu apprendre sur l’histoire de ce monument à partir de plusieurs sources. Maintenant je vais vous décrire (bien sûr aussi brièvement que possible) comment ce monument a pu aussi devenir une part de mon histoire : En 1997 (le 200ème anniversaire de Heinrich Heine), j’ai découvert un article dans le Hamburger Abendblatt sur l’odyssée d’un monument Heine qui m’a rendu curieux. Après plusieurs recherches, j’ai composé une petite brochure, une en allemand, une en français, et étant donné que je ne pas du tout parler français, donc tout ce qui était « français » a dû se faire par une interprète. Dans cette petite brochure, j’ai décrit ce que j’ai pu apprendre grâce à mes recherches personnelles. Assez naïf, j’ai commencé à envoyer mes brochures mais cependant à des adresses qui me semblaient absolument logiques. Par exemple à l’adjoint au maire de la ville de Toulon, Monsieur Louis Soccoja, responsable de la culture. J’ai effectivement reçu une réponse le 9 février 2001. Mais un mois après, Monsieur Soccoja a été destitué lors des élections municipales. Monsieur Claude Henri Bonnet assume les fonctions de Monsieur Louis Soccoja.
Le 21 juin 2001, j’envoie alors ma brochure au nouvel adjoint au maire. Fin juin 2001, ma brochure parvint également aux mains du directeur de la chaîne de télévision NDR, Jobst Plog. En sa fonction de président du canal culturel franco-allemand ARTE, Monsieur Plog est bien naturellement d’une importance particulière en ce qui concerne mon action. Le résultat fut que Monsieur Plog donna le feu vert pour produire un documentaire sur mes efforts dans le NDR 3 -Kulturjournal. Avant que cela ne se produise, le gouvernement changea à Hambourg, après les élections du 23 septembre 2001. J’ai dû par la suite encore trouver de nouveaux contacts afin de m’assurer le soutien du nouveau sénat de Hambourg. En novembre 2001, j’ai reçu une réponse deToulon avec un contenu plutôt décourageant : on disait ne pas être responsable, mais prétendait vouloir trouver la personne qui l’était pour le monument. En outre, la rédactrice responsable, Madame Sylvia Nagel, a prié plusieurs fois le maire de Toulon, Monsieur Bonnet, de bien vouloidonner une interview à NDR. Cependant M. Bonnet refusa en avançant l’argument qu’il était à ce moment trop impliqué dans les futures élections présidentielles françaises. Finalement,M. Bonnet se déclara prêt à nous donner des explications le 3 juillet 2002. Et par la suite, M. Bonnet déclara devant les caméras de NDR: „La ville de Toulon ne voit légalement aucune possibilité de revenir sur la donation faite autrefois. À moins de finir par trouver un héritier de ladonatrice (Madame Olivia Bouchard) et que cette personne soutienne expressément le retour du monument vers Hambourg dans une lettre à la ville de Toulon. Dans ce cas (et seulement dans ce cas), la ville de Toulon ne verrait pas d’objection à se séparer du monument Heine.“
L’enregistrement de cette interview (version très raccourcie) fut ensuite envoyé pour l’émission NDR-Kulturjournal le lundi 15 juillet 2002. Le diffusion de ce documentaire a fait bouger pas mal de choses: Entre autres, la maison d’édition Hoffmann & Campe se manifesta et me proposa son soutien. J’ai demandé l’accès aux archives de la maison d’édition dans l’espoir d’y trouver des renseignements sur les descendants recherchés de la dynastie Campe. Après des recherches dans les archives communales de Toulon qui furent infructueuses malgré le soutien actif de la directrice Mme C. Monge, aussi parce que je cherchais toujours le nom « Bouchard », j’ai pu avoir la permission de poursuivre mon „travail de recherche“ dans les archives de la maison d’édition Hoffmann & Campe. Après avoir farfouillé longuement et avec beaucoup d’efforts, j’ai enfin trouvé une minuscule mention manuscrite, de laquelle j’ai pu retirer que la fille de Olivia Bouchard, Elise, s’était mariée et qu’il ne fallait plus chercher Elise Bouchard mais plutôt une certaine Oliva Bouchard.
Heureux d’avoir fait une grande avancée, j’ai écrit à toutes les personnes de la région de Toulon qui répondaient au nom de X., je leur ai dépeint mon histoire en finissant par leur demander de me contacter si ce curriculum coïncidait avec la biographie de l’un de leurs ancêtres. Le 18 août 2002, j’ai effectivement reçu la lettre d’un certain Frédéric X., qui disait : „Je pense que je suis l’homme que vous recherchez.“ Il était le petit-fils de la recherchée. L’échange de lettres qui s’ensuivit avec cet homme s’est ensuite organisé de manière compliquée, surtout parce que je dois faire traduire toute la correspondance. Dans son dernier courrier, M. Frédéric X. s’exprima en ce sens qu’après tout si le monument devait encore changer de place, ce déménagement se ferait du « jardin botanique » de la ville de Toulon vers son jardin. Ma réponse du 22 janvier 2003 avait pour but d’indiquer que mon initiative n’était pas privée, que je ne voulais absolument pas placer ce monument dans mon jardin, mais que je souhaitais le rendre à nouveau accessible à la population de Hambourg. Je lui ai donc également envoyé ma brochure (en langue française) et lui ai demandé de bien vouloir prendre son temps pour réfléchir à la question une nouvelle foien tenant compte des nouveaux aspects. Afin de lui montrer que sa décision était absolument
d’intérêt public, j’ai sollicité un entretien avec Monsieur Ole von Beust, devenu maire de Hambourg entre-temps (18.09.2003), et je lui ai décrit le déroulement de mes activités à l’aide de ma brochure.
En même temps, je lui ai exposé mon plan, au cas où j’arrivais à faire revenir le monument à Hambourg, et que je connaissais déjà un emplacement magnifique sur l’Alster extérieure, en face de la « maison Heinrich Heine ». Devant le monument, je m’imaginerais bien un pupitre résistant aux intempéries sur lequel on pourrait feuilleter des plaques métalliques comme dans un livre dont les gravures pourraient raconter à chaque citoyen de passage l’aventure composant l’histoire de ce monument et à quel point celui-ci symbolise l’histoire européenne. On a discuter de ce qui pourrait être proposé à la ville de Toulon en contrepartie si jamais elle se décidait effectivement à rendre le monument. Il y a eu la suggestion d’inviter un groupe d’écoliers de Toulon, p.ex. pour une semaine à Hambourg et permettre là-bas des rencontres humaines. Des événements culturels complémentaires devraient également être envisagés. On était d’accord que l’argent serait uniquement secondaire, que le centre de l’idée de conciliation devrait être l’entente des peuples. Le maire Ole von Beust m’a promis d’écrire une lettre au maire de la ville de Toulon, M. Hubert Falco.
Il n’y eut pas de réaction.
– FIN –